Les pays européens sont très préoccupés par la crise politique où s’enlise la Tunisie, aggravée par des conditions économiques critiques. Invités mardi par le président de la République Kais Saïed, pour des échanges « à bâtons rompus », leurs ambassadeurs ont été unanimes à demander le dépassement, par le dialogue, de la crise institutionnelle qui secoue le pays. Les diplomates ont aussi réaffirmé leur pleine disposition à soutenir la transition tunisienne pour peu qu’ils aient, en face, des vis-à-vis crédibles.
« Le président de la République s’est montré très attaché à la constitution, déterminé à la défendre. Il est profondément convaincu que c’est son interprétation, qui est la bonne, en l’état actuel d’absence d’une cour constitutionnelle », souligne un ambassadeur présent lors de cette rencontre. « Aussi, il a longuement pointé du doigt la corruption, la malversation et la concussion qui rongent la société et intoxiquent le climat des affaires, déplorant le manque de réaction forte de la classe politique », ajoute-t-il tout en soulignant que cela n’a pas représenté de surprise ni de choc pour l’auditoire, « ces pratiques et attitudes gangrènent d’autres jeunes démocraties, mais finiront par s’estomper sous l’effet d’une éducation citoyenne continue, et une vigilance sans relâche. Le plus urgent, c’est de mettre fin à ce climat délétère et de sauver l’Etat du blocage politique. »
Les diplomates sont unanimes à faire passer le même message d’apaisement à la Kasbah et au Bardo ainsi qu’aux partis politiques. « Tous doivent faire mouvement pour se rencontrer. L’alternative est périlleuse, le recours à la rue ouvre la voie à tous les dangers », rappelle un autre diplomate. Sauf qu’entre temps, la formation islamiste Ennahda qui est aux affaires depuis la fuite de Ben Ali a honoré son engagement en poussant ses affidés à battre le pave « pour sauver la révolution ».
K Saïed, signale-t-on, avait profité de la rencontre pour évoquer nombre de sujets dont la nouvelle relation avec l’Europe, une solution partagée à trouver pour la question migratoire, la relance de la coopération économique, le renforcement de la coopération judiciaire, l’approche politique de soutien en faveur du rapatriement des biens et avoirs confisqués détenus en Europe, la sortie de crise en Libye, les grands projets, dont le TGV et le pôle santé à Kairouan, etc.
Pour rappel, en butte au refus du président de recevoir la prestation de serment de ministres sous poursuites judiciaires ou soupçons de conflit d’intérêt, Hichem Mechichi a choisi de resserrer son gouvernement. C’est ainsi qu’il s’est délesté des ministres dont il avait annoncé le limogeage pour les remplacer par d’autres membres du gouvernement, ayant déjà accompli la prestation de serment en septembre dernier, les chargeant d’en assurer l’intérim.