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« MBZ » à Paris : Coopération tous azimuts…

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Mohamed Ben Zayed, alias « MBZ », ministre de la Défense d’Abou Dhabi, partenaire privilégié de Paris, était à Paris mercredi pour rencontrer Emmanuel Macron. De qui cette visite est-elle le nom à l’heure où les pétromonarchies s’inquiètent du repli US de la région ?

«Monsieur Emmanuel Macron et Son Altesse Cheikh Mohammed ben Zayed Al Nahyane ont exprimé leur volonté commune d’approfondir et d’étendre le partenariat entre» la France et les Émirats arabes unis, rapporte un communiqué de l’Élysée. La visite du prince héritier émirati à Paris semble être un succès.
Réunis au fastueux château de Fontainebleau à l’occasion d’un déjeuner, les deux dirigeants ont fait part de leur volonté de «coopérer dans tous les domaines afin de résoudre ensemble les problèmes internationaux et régionaux communs». Les Emiratis font preuve de largesses en France. Ainsi, la restauration du théâtre du château a été financée à hauteur de 10 millions d’euros par le frère de Mohammed ben Zayed (MBZ). Mais on est loin, il est vrai, des placements émiratis en Grande Bretagne et/ou aux USA.
Pour Gérard Vespierre, directeur de recherche à la Fondation d’études pour le Moyen-Orient (FEMO), «il y a quatre grands axes: la lutte contre l’islam politique, les opportunités économiques que présentent les émirats, l’intérêt mutuel pour les secteurs de haute technologie et le militaire.»
En effet, MBZ, le ministre de la Défense d’Abou Dhabi, est un féroce combattant de l’islam politique, en particulier celui porté par les « Frères musulmans », promus par le duo turco-qatari. Que ce soit en Égypte où il soutient le Président al-Sissi, ennemi juré de la mouvance frériste, en Libye, où il soutient le maréchal Haftar ou en Méditerranée orientale, où il dénonce l’agressivité turque, le dirigeant se pose en rempart face à cet islam politique.
Sur le plan économique également, le pays offre de séduisantes perspectives à Paris. Les Émirats renferment 6% des réserves prouvées de pétrole au monde avec une population nationale réduite (10,4 millions d’habitants, dont seulement 12% de souche). Ces dispositions en font un partenaire économique privilégié, et le volume des échanges commerciaux bilatéraux s’est établi à 4,8 milliards d’euros en 2019.
Les occasions d’investissements réciproques sont légion. Le fonds souverain d’Abou Dhabi promettait ainsi en 2020 d’investir un milliard d’euros dans les fleurons de l’économie française.
«Les Émirats arabes unis sont les leaders du monde arabe et musulman dans le domaine des hautes technologies», rappelle le directeur de recherche à la FEMO. Les secteurs du spatial et de l’intelligence artificielle les intéressent particulièrement. Deux secteurs d’avenir dans lesquels ils investissent largement. Encore un domaine d’intérêt mutuel entre les deux pays.
Enfin et surtout, Abou Dhabi est un partenaire majeur de la France du point de vue militaire. Les deux pays sont liés depuis 1995 par un accord commun de défense. Depuis 2009, la France dispose dans la capitale des Émirats d’une base aérienne stratégique pour ses opérations au Moyen-Orient. Celle-ci a notamment servi à l’évacuation vers l’Hexagone des derniers ressortissants français d’Afghanistan, ainsi que de citoyens afghans en danger. C’est également de cette base que partaient une partie des jets qui allaient frapper l’État islamique en Irak, comme en Syrie.
Au-delà de ce partenariat stratégique dans une région où la France se fait de plus en plus rare, les Émirats sont un important client de l’industrie d’armement française. Ainsi, les commandes d’armes des Émirats à la France ont totalisé 4,7 milliards d’euros entre 2010 et 2019, dont 1,5 milliard pour la seule année 2019, selon le rapport 2020 au Parlement sur les exportations d’armement.
Mais quid des dérives politiques du régime émirati? Dans le classement de «qualité de démocratie» réalisé par l’université de Wurzburg en Allemagne, les Émirats se situent à la 153e place (sur 176) et sont décrits comme une «autocratie dure.»
A cette vision politique s’ajoute le sanglant engagement militaire émirati dans le conflit yéménite. D’autant que durant cette guerre, la France a parfois été impliquée indirectement aux côtés d’Abou Dhabi. Un site de liquéfaction de gaz au Yémen dont l’entreprise française Total est actionnaire principal à hauteur de 40% était utilisé par les Émirats comme base militaire et prison où des combattants houtis étaient torturés. C’est ce qu’affirmaient en décembre 51 députés français dans une lettre ouverte à Jean-Yves Le Drian.
Paris préfère fermer les yeux et adopter une politique pragmatique.

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